Neurosciences

Le coin des parents Janvier 2019 Mieux comprendre les comportements et les émotions de l'enfant avec les neurosciences

De génération en génération, l'éducation de l'enfant a évolué. L'enfant n'est plus seulement un corps à nourrir et à langer, ça n'est plus non plus un petit monstre pervers qui profite de l'adulte pour arriver à ses fins. Le regard de l'adulte a changé grâce aux nombreuses observations cliniques de cliniciens ( D.Winnicott en Angleterre, Françoise Dolto en France) qui nous introduit au monde psychique de l'enfance.

Ces dernières années, les recherches scientifiques (IRM) sur le fonctionnement du cerveau ont été étendues au cerveau de l'enfant et c'est ainsi que l'on a pu arriver à certains constats:

  • L'enfant naît immature et son développement aussi bien physique que psychique va prendre de nombreuses années.
     
  • Le cerveau de l'enfant aussi est immature.
    Au début de la vie, il y a prédominance de l’activité du cerveau droit, qui gère les registres moteur et émotionnel, tous deux étant très connectés, pendant les deux premières années de la vie. L’hémisphère gauche, lui, soutient le développement cognitif , il évolue plus lentement, c'est à partir de la 3éme année qu'il devient dominant. Le cerveau atteint son niveau de maturité autour de 25 ans! Chaque enfant étant différent, nous constaterons donc des différences significatives entre les enfants d’un même âge.
     
  • Les comportements sont hors contrôle : on parle de comportements pulsionnels, ça n'est pas l'enfant qui décide des comportements déclenchés par un état émotionnel fort, il les subit en réalité.
    De même, l'enfant apprend par imitation en particulier grâce aux neurones miroirs (zone préfrontale) qui déclenchent des comportements et des émotions sans aucun contrôle (ex contagion émotionnelle des bébés, mimétisme) il refait sans savoir ni sans évaluer les conséquences.
     
  • Le développement du cerveau est fortement influencé par l'environnement, celui ci peut être aussi bien facteur de stress que de réassurance, d’apaisement. On dégage deux grands facteurs d'influence fondamentale:

    ♦ La dimension génétique, le terrain de base de l'enfant , qui laisse apparaître des influences maternelles ou paternelles ( la couleur des yeux, des cheveux ou un certain tempérament de base , calme, colérique, sensible...) indépendamment du sexe de l'enfant

    ♦ L'environnement dans lequel vit l'enfant va influencer le développement de ce terrain génétique, en particulier humain
     

Depuis de nombreuses années, nous savons que pendant la grossesse l'enfant perçoit des modifications physiques sensorielles à l'intérieur du corps de la mère. Des études ont montré qu'un événement qui touche la mère sur le plan émotionnel va affecter l'enfant par l'intermédiaire du rythme cardiaque ou des marqueurschimiques comme les hormones ou les neuro-transmetteurs, qui sont entre autres responsables de la gestion du stress et donc aussi la compétence à faire des apprentissages. Or, pour pouvoir faire des apprentissages, intégrer des schémas comportementaux, mémoriser, il faut que l'état émotionnel soit stable, nous mêmes les adultes nous le savons bien.
Ainsi, un état dépressif de la mère ou du père, va influencer la structuration affective de l'enfant dès la naissance.

Boris Cyrulnik, parle de niche sensorielle quand il évoque l'ensemble des stimulations adaptées aux besoins de l'enfant qui jalonnent la vie de l'enfant jusqu'à l'émergence du langage autour de 20 mois, période particulièrement sensible dans son développement. Un enfant qui a manqué de niche sensorielle verra le développement de son cerveau, en particulier émotionnel, être perturbé. Notre cerveau possède une qualité particulière, il s'agit de ce que l'on nomme la plasticité cérébrale, c'est à dire la capacité à récupérer des compétences retardées ou non intégrées du fait de certaines carences ou traumatismes.

En crèche, nous sommes particulièrement attentifs à ces notions pour mieux comprendre les comportements des enfants, leurs réactions émotionnelles et ainsi mieux ajuster nos réactions à l'expression de leurs besoins. En plus des besoins de repères individuels en matière de sommeil et d'alimentation, de la santé, l'enfant a un grand besoin d'être compris et de reconnaissance de ses émotions, dont la colère qui n'est donc pas du tout ni un caprice ni une comédie, mais un stress généré par la frustration.

Si un enfant mord ou tape ou bouscule un autre enfant autour de 20 mois, 2 ans voire plus, nous considérons cela comme normal. Il ne sait pas encore communiquer, ne peut contrôler ses pulsions, ni ses réactions émotionnelles (cris, pleurs), il n’est donc pas responsable de ses maladresses relationnelles. Il va donc falloir lui expliquer, l'aider à décoder ce qui lui arrive, le rassurer pour contenir ses émotions trop fortes, (influencé par le tempérament pulsionnel, la fatigue, la santé) avec le doudou s'il en a un. Nous ne serons pas surpris non plus si il recommence. Il est possible qu'il soit dans l'imitation en priorité (imiter les autres pour apprendre ) et qu'il ait aussi besoin de l'attention de l'adulte (surtout en collectivité), or quoi de plus simple que de faire répéter l'adulte pour attirer son attention. Ce que l'on voit surtout le soir lorsque les parents viennent chercher leur enfant, souvent fatigué de sa journée, qui alors s'agite, fait des « bétises » et signifie là qu'il a besoin qu'on s'occuper particulièrement de lui.

Cette attention bienveillante portée sur chaque enfant participe de sa construction émotionnelle et cognitive et l’aide à contenir ses propres émotions.

Nous sommes tous concernés par cette veillance autour de l'enfant afin de le préserver le plus possible des perturbations qui font la vie aussi.
 

Il faut tout un village pour élever un enfant ! Isabelle Lelouvier Psychologue

Isabelle Lelouvier
Psychologue